Si lire c’est voyager, le roman graphique vous promet un road trip inoubliable. Cumuler tant de stimulations sensorielles en feuilletant du papier, ça tient du miracle. Pour différencier le roman graphique de la B.D, disons que le roman graphique se publie en format long, destiné en général à un public adulte. Il aborde généralement des sujets profonds ou autobiographiques. Alors, embarquez pour une promenade sur la route des 7 meilleurs romans graphiques sélectionnés pour vous.
Un pacte avec Dieu, de Will Eisner
Ce roman graphique, c’est la route historique, celle qu’on prend pour elle-même, pas seulement un moyen d’arriver à destination. D’abord parce que Will Eisner est l’un des pionniers du roman graphique. Dans ce premier acte de la trilogie du Bronx, il nous fait vivre quatre histoires dans la communauté juive du New York des années 30. En toile de fond, les vibrations autobiographiques de la perte d’une enfant de 16 ans. Vous allez respirer l’air de cet immeuble new-yorkais. Vous allez goûter l’atmosphère colorée de ses habitants, même par des pages monochromes.
Will Eisner ne se contente pas de recevoir des prix, il leur donne son nom ! (Le prix Eisner pour les auteurs de bande dessinée aux USA)
Blankets, de Craig Thompson
Ou Quand Craig rencontre Raina. Une histoire d’amour se tisse dans un décor de religion fondamentaliste américaine des années 90. Ce roman soulève la question de l’identité dans un graphisme très immersif. Plongez dans la vie de cet adolescent passionné de dessin. Traversez ses émotions, dans cette idylle difficile, mais jamais en mode chamallow. Un roman graphique beau comme une jolie route, dont le paysage défile, mais laisse un goût de nostalgie.
Lequel des deux Craig est le plus satisfait en recevant ses nombreux prix ? L’adolescent qu’il était, ou l’auteur accompli ? Trois prix Harvey, deux prix Eisner (meilleur album — matériel inédit et meilleur scénariste/dessinateur) et, en France, le prix de la critique décerné par l’ACBD. Rien que ça !
WatchMen, de Alan Moore
Avec Watch Men, vous pensez emprunter une route bien sympathique et vous prenez une claque après le premier virage. Et Bim ! Les super héros en prennent pour leur grade dans ce magnifique roman graphique en couleurs. Mais en réalité, l’histoire est secondaire. C’est une œuvre d’art ! Format, couleurs, rythme des animations, vous pourriez vous arrêter sur chaque planche. Mais vous arriveriez moins vite à cette fin controversée… À lire AVANT de déguster la série (suite) de Damon Lindelof.
Alliage parfait d’Alan MOORE (scénario), Dave GIBBONS (dessins) et John HIGGINS (couleurs), Watch Men est le premier roman graphique à recevoir le prix Hugo. Au palmarès :
- Prix Eisner, 1988
- Meilleur album étranger, festival d’Angoulême, 1989
- Prix Max Moritz, 1990
- Prix Urhunden, 1992
- Parmi les 100 meilleurs romans en langue anglaise depuis 1923, Time
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Maus, Art Spiegelman
S’il n’y avait qu’une route, ce serait celle de Maus. Passez par cette route, mais mieux encore, faites quelques pauses. Vous apprécierez le voyage. Deux époques se mêlent au fil des planches. D’un côté, on traverse les relations actuelles compliquées entre un père et son fils. De l’autre, la Shoah vécue par le père, Vladeck. Les générations se croisent sur des carrefours intemporels, comme l’amitié, par exemple. Dans ce roman graphique, les nazis sont des chats et les persécutés sont des souris.
Art Spiegelman est né à Stockholm, de parents juifs rescapés de l’Holocauste. Résident américain, il devient magicien avec Maus. En effet, il y raconte l’horreur de la déportation avec émotion, et vous offre le moyen de prendre du recul pour la vivre sans malaise.
Prix Pulitzer spécial en 1992, c’est une récompense inédite pour une bande dessinée.
La dernière Reine, de Jean-Marc Rochette
Prenez la route de montagne pour vous perdre dans cette nouveauté, au cœur du Vercors. Le bleu profond du roman vous met dans l’ambiance. Vous y accompagnez Edouard Roux, soldat des tranchées, écorché (dans tous les sens), et Jeanne Sauvage, sculptrice animalière, qui redonne un visage aux rescapés de la guerre de 14-18. Vous voulez de l’évasion ? Vous y êtes. L’auteur réussit la prouesse de mêler de nombreuses thématiques sans perdre ou lasser. Dernier ours du Vercors, Montmartre et l’art, la stupidité des hommes, et Nature avec un grand N, un voyage romantique vous attend !
Jean-Marc ROCHETTE est imprégné de montagne. Guide de haute montagne, jusqu’à son accident en 1976, sa résilience passe par la bande dessinée. La dernière Reine est déjà primée : livre de l’année 2022 par Lire Magazine littéraire, Grand Prix de la BD Elle 2022, Grand prix RTL de la bande dessinée 2022.
Jimmy Corrigan, de Chris Ware, 1995
Avec ce roman graphique, vous empruntez une route sinueuse, où le chauffeur doit rester concentré. Ce puzzle à vignettes se met en place par des saynètes autour de Jimmy Corrigan. La trentaine immature, il part à la rencontre de son père, qui l’a abandonné avec sa mère possessive. Virages psychologiques, liens familiaux, c’est un très large portrait social, comme une grande photo de famille déchirée qui révèle ses détails progressivement. Votre curiosité est piquée ? Tant mieux. Il est unique. Côté graphisme, le New York Times la déclare comme probablement la bande dessinée la plus accomplie de tous les temps. No comment.
L’américain Chris WARE, est né dans les (feuilles de) choux dans une famille de journalistes et d’éditeurs. Mais l’encre dans le sang ne garantit pas le talent. Lui, il l’a, et le développe dans les arts. Il fait naître Jimmy sur les bancs de l’université. Puis son personnage intègre les hebdomadaires de Chicago avant de prendre le pouvoir dans un roman. C’est un succès :
- Le seul ouvrage à recevoir les prix Alph’Art du meilleur album ET le Prix de la critique en 2003 à Angoulême
- La seule bande dessinée à recevoir le Guardian First Book Awarden 2017
- Entre autres…
Persepolis, de Marjane Satrapi
C’est l’une des routes les plus connues, la route 66 du roman graphique. Tout le monde connaît, même ceux qui ne l’ont pas emprunté. Ce volume rassemble les quatre tomes d’une autobiographie qui couvre les années 1978-1994 à Téhéran. Petite fille révoltée, Marjane vit l’aube de la Révolution iranienne dans des pages, qui laissent la place au texte. La dualité noir/blanc crée des images fortes et profondes. Respirez tous ces parfums orientaux en glissant sur la frise historique de l’Iran avec humour décalé et autodérision.
Marjane SATRAPI, artiste franco-iranienne, jette un gros pavé dans le monde du roman graphique avant de devenir réalisatrice et porter fidèlement son œuvre majeure sur écran. Politiquement engagée et polyglotte, elle multiplie les prix et les récompenses internationales :
- Alph-Art coup de cœur du festival d’Angoulême (tome 1), 2001
- Prix France Info de la Bande dessinée d’actualité et de reportage(Tome 2), 2002
- Alph’Art du scénarioau festival d’Angoulême (Tome 2), 2002
- Prix Harvey pour la meilleure édition américaine d’une œuvre étrangère, 2004
- Prix Max et Moritz (Allemagne) de la meilleure publication de bande dessinée importée, 2004
- Prix Urhunden (Suède) pour le meilleur album étranger (Tome 1), 2005
- Prix Ignatz (USA) du meilleur roman graphique (tome 2), 2005
- Prix Sproing (Norvège) de la meilleure bande dessinée étrangère, 2005
Cette brève sélection veut vous faire toucher du doigt l’univers du roman graphique. C’est un simple panneau indicateur. Elle n’a pas la prétention d’être la seule voie, mais vous laisse créer la vôtre. Et vous, quelle est votre sélection ?